Éclairage

RÉÉVALUATION MENSUELLE DU TAUX D'USURE, QUEL IMPACT SUR LE MARCHÉ IMMOBILIER ?

03/04/2023

Éclairage avec Thomas Prud'Homoz, notaire associé.

Revu à la hausse en ce début d’année, le taux d’usure sera réévalué chaque mois (et non plus de façon trimestrielle) jusqu’au 1er juillet 2023. Dans un contexte de remontée des taux d’intérêt et de durcissement des conditions d’octroi de crédit, cette mesure a pour ambition de faciliter l'accès au crédit des ménages. Comment analyser l’impact de ce changement sur le marché immobilier ? 

Qu’est-ce que le taux d’usure ?  

Le taux d’usure est le taux au-dessus duquel les banques ne peuvent pas prêter. C’est un taux maximum fixé par la Banque de France sur la base de modalités de calcul précises. Celui-ci tient compte non seulement du taux d’intérêt fixe mais également des frais accessoires (frais de dossiers, frais de garantie, et assurance compris) qui sont liés au prêt.   

Il faut avoir à l’esprit que le taux d’usure est un garde-fou pour les emprunteurs. Il leur permet de ne pas devoir emprunter à des taux trop élevés qui seraient fixés arbitrairement par les banques.   

Quid de la hausse du taux d’emprunt ?   

Actuellement, le taux d’emprunt augmente de manière très rapide. Nous sommes passés de taux qui s’élevaient à 1% en janvier 2022, à des taux qui atteignent aujourd’hui les 3,5%. Tout porte à croire qu’ils pourraient atteindre les 4% dans les prochains mois.   

Il a été reproché aux pouvoirs publics de ne pas tenir compte de cette hausse significative du taux d’emprunt dans la fixation du taux d’usure. Ce qui a pour conséquence de bloquer les dossiers de demande de prêt immobilier auprès des banques car la marge de manœuvre de ces dernières est trop faible.    

C’est pourquoi il a été décidé de relever le taux d’usure qui désormais, à titre exceptionnel, peut faire l’objet d’un réajustement mensuel jusqu’au 1er juillet 2023.  

En quoi ce réajustement mensuel du taux d’usure est-il pertinent ? Qu’est-il prévu pour la suite ?    

Le taux d’usure pourra suivre au mieux l’augmentation des taux de crédit immobilier. Sans une telle mesure on peut supposer qu’avant l’issue d’un trimestre il ne serait plus possible aux banques de proposer des taux inférieurs au taux d’usure.

Toutefois, gardons en tête que si les taux d’usure suivent correctement la trajectoire du taux d’emprunt, les prêts seront de plus en plus élevés…  

Quant au point de savoir s’il faut pérenniser la mensualisation, il est difficile de se prononcer à ce stade car cela va dépendre de la durée de la tendance haussière du taux d’emprunt que l’on vit actuellement.    

En tant que notaire, comment accueillez-vous cette tendance haussière ?   

Je veux insister sur le fait que nous ne traversons pas une crise. Nous assistons simplement à une tendance de marché déjà connue par le passé. Souvenez-vous : il y a 10 ans on empruntait déjà à 4%. Or, l’expérience nous montre que le marché finit par s’adapter.   

La hausse des taux d’emprunt est corrigée par la baisse des prix à terme. En termes d’impact sur le flux des transactions, nous ne nourrissons pas de crainte particulière.